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Les effets de l'européanisation des politiques d'innovations sur les startups

Avec l’effervescence autour de la Silicon Valley aux États-Unis et l’avènement de la French Tech en France, les startups font l’objet de toutes les attentions de divers investisseurs et spéculateurs. Cet anglicisme, traduisible par « jeune pousse », désigne une structure pionnière, évoluant sur des marchés innovants et potentiellement vectrice d’une croissance économique exponentielle. Apple, Facebook, Google mais aussi BlaBlaCar : les belles histoires sont nombreuses, et c’est pour cela qu’à l’échelon européen, la question des startups est prise très au sérieux pour la réalisation du marché unique.

 

 

La situation en Europe

 

Si l’émergence des premières startups européennes remonte au début du XXe siècle, c’est la multiplication dans les années 1990 des « entreprises point com », profitant du développement de l’Internet, qui a popularisé le concept. Depuis, dans ce domaine où les Américains font florès, il s’en créerait près de 10 000 par an dans le monde, dont plus de 500 en France. En Europe, leur entrée en bourse de plus en plus fréquente est même encouragée, avec des systèmes multilatéraux de négociations dédiés comme Euronext Access.

 

Malgré un taux d’échec avoisinant les 90% et de nombreux rachats par des entreprises plus actives économiquement, les incubateurs et accélérateurs de startups fleurissent et l’engouement perdure. Si par le nombre de jeunes pousses, Paris et Londres se disputent le premier accessit — avec un net avantage pour nos voisins outre-manche — nombre de PDG américains prophétisent que « l’avenir, c’est la France ». En effet, en 2016, les startups de l’Hexagone ont levé plus de 2 milliards d’euros, témoin de la lucrativité du secteur. Dans ce classement très scruté par les investisseurs, Berlin caracole en troisième position, tandis que le marché espagnol du capital- risque, en légère déprime depuis le début de la crise, connaît actuellement un regain d’attractivité.

 

 

Le programme « Horizon 2020 »

 

Malgré quelques lourdeurs administratives, une imposition parfois dissuasive et le manque de business angels, l’Europe est ainsi un terreau fertile pour les startups. L’Union Européenne, consciente de la nécessité d’accompagner ces jeunes entrepreneurs, s’est emparée de la question à la fin des années 2000. Avec l’inauguration en 2010 de la stratégie « Europe 2020 » sur la coordination des politiques économiques des États membres, la Commission européenne esquissait déjà un programme ambitieux en matière de croissance verte, d’innovation et de recherche et développement. Puis, en décembre 2013, était lancé le plan « Horizon 2020 », un nouveau fonds européen de recherche et d’innovation doté de près de 80 milliards d’euros.

 

En vigueur depuis le 1er janvier 2014, c’est le plus large programme de financement mis en place par Bruxelles. 20% des crédits sur sept ans y sont réservés à l’innovation dans les startups et les petites et moyennes entreprises. Axée sur les entreprises présentant un fort potentiel de croissance et d’internationalisation sur le marché intérieur, cette démarche vise à les pérenniser afin, à long terme, de faire émerger des champions européens capables de rivaliser avec leurs homologues étasuniens. Horizon 2020 se distingue également par sa souplesse : les entrepreneurs n’auront pas à rembourser les sommes versées, et ce, même en cas de faillite.

 

 

Vers la mise en place d’une « Union de l’innovation ?

 

L’objectif de ce programme pan-Européen est clair : fluidifier les échanges d’idées et la circulation des travailleurs entre les États membres afin de mutualiser leurs moyens et de fortifier le marché intérieur. Corrélativement, les prétendants à cette attelle à l’innovation doivent s’engager à promouvoir l’excellence scientifique et à mener des projets interdisciplinaires, englobant innovations technologiques et non- technologiques.

 

A travers ce programme, Bruxelles cherche également à répondre aux « grands défis sociaux et économiques » de son époque à l’instar du climat, de l’énergie ou de la santé. Couplées à la course effrénée au profit des entrepreneurs, de telles ambitions requièrent une organisation millimétrée, qui se traduit notamment par un accompagnement des startups à chaque étape de leur vie. Ainsi, des enveloppes pourront être données pour l’évaluation d’un concept ou de sa faisabilité par rapport au marché convoité.

 

D’autres seront octroyées pour que les idées arrivent à maturation, via notamment la création de prototypes ou la première application commerciale d’un produit. Enfin, des subventions à la commercialisation du produit pourront être accordées aux startups au projet plus abouti. Mais si les bénéficiaires se comptent déjà par centaines, comme le Français PayPlug, dont l’aide d’1,75 million d’euros lui a permis de doubler ses effectifs et d’accélérer la recherche et développement ; la concurrence reste rude : à la mi-juin 2014, près de 2 700 propositions avaient été soumises pour que des concepts soient évalués.

 

 

Les enjeux à venir

 

S’il contribue à renforcer la compétitivité et l’attractivité européenne en matière de recherche, d’innovation et de technologies, ce programme est destiné à évoluer avec le temps. En effet, la prise de risques et la créativité inhérentes aux startups requièrent de l’Union Européenne une adaptation rapide aux exigences d’un marché aussi attractif qu’erratique. Pour le moment, sa stratégie est payante : en septembre, le fonds a bénéficié à trois startups de services de paiement utilisatrices de la block chain, technologie de stockage et de transmission d’informations basée sur la transparence, l’infalsifiabilité et l’auto-régulation. En outre, en réponse au développement exponentiel du bitcoin, il serait également question de créer une cagnotte spécifique aux entreprises ayant recours aux crypto-monnaies, bien que leur volatilité inquiète certains experts.

 

Néanmoins, l’Union Européenne se montre indécise quant à la législation à appliquer aux startups, suscitant les critiques de nombreux observateurs. Au Parlement européen, certains lobbyistes craignent que la très controversée réforme des droits d’auteurs, débattue depuis des mois, sape la confiance des investisseurs européens et étrangers dans le marché communautaire.

En effet, une disposition afférente à la prospection de données pourrait fixer un délai de trois ans à l’issue duquel les startups seraient traitées comme n’importe quelle entreprise sur le marché et ne bénéficieraient notamment plus des aides vitales d’« Horizon 2020 ». Si des exemptions pour les jeunes entrepreneurs ont été proposées, le flou demeure et les eurodéputés tournent casaque au gré des interventions de commissions spécialisées et de représentants d’intérêts. Une déconnexion frustrante entre la volonté de Bruxelles d’établir un marché unique de l’innovation, basé notamment sur le numérique, et les moyens concrets pour y parvenir.

 

Enfin, outre Manche, c’est plutôt la perspective d’un Hard Brexit qui effraie les startups : à la suite du référendum de juin 2016, les capitaux investis au Royaume-Uni ont seulement augmenté de 75 millions de dollars, contre une hausse de près de 600 millions en France entre les deuxième et troisième semestres. Nombre d’entrepreneurs, qu’ils soient locaux ou étrangers, songent à rapatrier une partie de leur activité sur le Vieux Continent ou tout simplement à s’y relocaliser. Face à l’incertitude et soucieux d’éviter une hémorragie, Downing Street a promis qu’un plan de soutien aux startups sera promptement mis en place, sans pour autant le détailler.

 

 

Thibault Lechevallier


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