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Portrait d'un philanthrope entrepreneur : Elon Musk, génie ou savant fou ?

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« Si vous ne pouvez pas battre la machine, le mieux est d’en devenir une » Voila qui pourrait dresser en quelques mots le portrait d’Elon Musk. Cette citation qu’il a tenu lors du World Government Summit de 2017 résume en effet tant sa pensée que ses actions.

 Cet excentrique personnage a une vision bien particulière de ce à quoi l’avenir va - ou devrait - ressembler, où hommes et machines au delà de la simple cohabitation vivraient en parfaite symbiose. En effet pour lui, non seulement les robots dotés d’intelligence artificielle feront partie intégrante de notre quotidien, mais surtout l’homme sera plus que jamais relié à la technologie en passant entre autre par des implants neuronaux. Ces implants permettraient par exemple de se connecter directement au réseau - à l’Internet, sans avoir à passer par une interface comme un ordinateur ou un smartphone. Des robots humanoïdes d’un coté, des humains robotisés de l’autre, voila une partie du futur qu’imagine Elon Musk pour l’humanité.

 

Intelligence artificielle et robotique : entre peur et fascination


Mais ce n’est pas qu’un simple rêveur à l’imagination débordante. Non, cet homme se donne les moyens de ses ambitions en étant à la tête d’un petit empire technologique qui se développe chaque jour un peu plus, dans lequel on peut retrouver sa société automobile - Tesla - son entreprise d’astronautique et vol spatial - SpaceX - ou encore quelques projets à haute teneur en avancée technologique comme l’Hyperloop, ce train magnétique à très haute vitesse. Mais il ne s’arrête pas à la gestion de son empire technologique, et se permet même le luxe de développer sa propre réflexion, sa propre pensée sur l’éthique de la robotique et de l’intelligence artificielle ou encore sur le transhumanisme. Réflexion parfois clivante, très souvent marquée du sceau de l’extravagance. On peut par exemple parler de sa théorie selon laquelle notre réalité n’aurait qu’une chance sur un milliard d’être la bonne. Comprendre par là, que selon lui, il y a de forte chances que notre réalité ne soit pas réelle mais simplement le fruit d’une simulation. Quelqu’un aurait-il murmuré Matrix? Parfaite illustration d’une théorie extravagante qui a donné lieu à quelques débats - plus ou moins fructueux - pour tenter de démontrer que nous ne pouvons pas vivre dans une simulation. Mais là où Elon Musk détonne, c’est qu’il entretient une culture du paradoxe intellectuel. C’est en effet un fervent défenseur de la robotisation et de l’avancé technologique qui affirme que les robots et l’intelligence artificielle sont potentiellement plus dangereux que les armes nucléaires.

 

Comment ? Une des personnes participant le plus à la recherche sur la robotique et l’intelligence artificielle aurait peur de ces derniers? Cette affirmation est à remettre dans son contexte, celui d’une lettre ouverte co-signée par plusieurs centaines de chercheurs, scientifiques et penseurs comme l’éminent Stephen Hawking, qui expliquent que l’intelligence artificielle serait dangereuse dans le cas où l’humanité n’arriverait pas à la maitriser. Pour comprendre comment l’intelligence artificielle pourrait s’avérer dangereuse pour l’homme, on peut parler d’une étude menée par deux chercheurs, Laurent Orseau et Stuart Armstrong. Le postulat de base est que l’intelligence artificielle est capable d’apprendre, en réalisant un série d’actions, avec un système de « récompenses » qu’elle reçoit à chaque fois qu’un objectif est atteint ; seulement les chercheurs précisent qu’il peut être nécessaire pour un opérateur humain d’arrêter les séquences d’action de l’IA en appuyant sur un bouton rouge, car celle ci pourrait avoir un impact sur lui ou son environnement. Seulement comme l’IA sait qu’elle va recevoir une récompense après avoir terminé cette séquence d’actions, elle pourrait être amenée à trouver un moyen de désactiver ce bouton rouge, que ce soit de façon logicielle en hackant le système ou de façon mécanique en faisant en sorte d’empêcher l’opérateur humain d’appuyer sur le bouton rouge par tous les moyens - même les plus extrêmes.

 

Cette lettre ouverte invite donc à prendre conscience des dangers potentiels de la robotique et de l’intelligence artificielle si aucun garde-fou n’est mis en place. Pour autant, Google, à l’origine de l’enquête des deux chercheurs, cherche à mettre en place un système de contrôle qu’une IA ne pourrait contourner, même si il existe les fameuses trois règles d’Asimov sur l’éthique de la robotique afin d’empêcher toute machine de blesser un humain :

 

1)    un robot ne peut porter atteinte à un être humain, ni, en restant passif, permettre qu'un être humain soit exposé au danger

2)    un robot doit obéir aux ordres qui lui sont donnés par un être humain, sauf si de tels ordres entrent en conflit avec la première loi

3)    un robot doit protéger son existence tant que cette protection n'entre pas en conflit avec la première ou la deuxième loi

 

Pour montrer cette prise de pouvoir par les machines sur l’homme malgré certaines précautions, le film I Robot est une bonne illustration où on peut y voir une intelligence artificielle ayant dépassé la compréhension des trois règles éthiques de la robotique, et a fini par considérer que l’élimination d’une frange de la population jugée dangereuse pour l‘humanité permettait de mieux respecter ces trois règles. On ne saurait prédire avec exactitude la façon dont une machine va interpréter des règles ou commandements, et donc affirmer avec certitude qu’il n’y a aucun danger pour l’homme. Petit exemple amusant d’une machine ayant agit d’une façon inattendue, où on lui avait demandé de jouer à Tétris sans perdre : résultat, la machine a mis le jeu sur pause indéfiniment. Les craintes de voir naitre un avenir façon Terminator, rempli de machines tueuses, ont été étudiées relativement tôt et un récent partenariat a vu le jour sur l’éthique de l’intelligence artificielle par de grands groupes comme Google, Facebook, Amazon, IBM et Microsoft - qui misent énormément sur l’IA pour le développement de leurs produits - mais également par Elon Musk et certains de ses partenaires avec la création d’une association de recherche à but non lucratif sur la sécurisation de l’IA, OpenAI.

 

Tesla Motors et Hyperloop : vers les moyens de transport de demain


Car oui, si le groupe OpenAI est à vocation non lucratif, ce n’est pas pour rien. Cela s’inscrit parfaitement dans la pensée philanthropique d’Elon Musk, qui profite de ses milliards pour favoriser le développement technologique. On peut citer le cas notoire du PDG de Tesla Motors qui a décidé d’ouvrir à la concurrence l’ensemble de ses brevets, afin que tout le monde puisse en bénéficier. Sa justification? « Si une entreprise dépend de ses brevets, c'est qu'elle n'innove pas ou alors qu'elle n'innove pas assez rapidement » Mais surtout, cette ouverture des brevets partait d’une constatation bien plus triste. Si Tesla Motors se protégeait à ses débuts derrière ses brevets, c’était pour éviter que cette entreprise naissante ne se fasse engloutir par les géants historiques de l’industrie automobile. Seulement, il s’est avéré que ces mastodontes ne se sont absolument pas intéressés à l’automobile électrique et avaient une production ridiculement faible de ces véhicules. Tesla Motors n’étant pas en capacité de construire des véhicules électriques en quantité suffisante pour endiguer la « crise du carbone » Elon Musk a décidé d’ouvrir ses brevets dans l’espoir que des sociétés s’en emparent et développent d’avantage le véhicule de demain. Coup de pub ou réelle volonté d’améliorer la planète, toujours est-il que ce genre d’actions typiques du personnage vont dans le sens d’un monde meilleur.

 

Tesla Motors, c’est aujourd’hui 2 modèles avec la Tesla S, une berline de luxe et la Tesla X, un SUV mais également une petite nouvelle, la Model 3 qui sera vendue courant 2018 pour un billet d’entrée à 35.000€, de quoi sérieusement démocratiser la voiture électrique. Outre l’aspect écologique de ces voitures - même si demeure la question de la pollution nécessaire à la fabrication de l’électricité ou encore du recyclage des batteries - un des intérêts majeurs quand on rejoint l’écurie Tesla est d’avoir accès à une panoplie de technologies en tout genre. Un exemple? Fini le tableau de bord classique, place à un grand écran tactile pour tout gérer du bout des doigts. Et ne pensez pas qu’il s’agit d’un « grand » écran de 8 pouces comme sur certains modèles d’autres marques. Non, chez Tesla on voit les choses en grand et on vous offre un écran de contrôle de pas moins de 15 pouces sur le Model 3. Mais un autre intérêt d’acheter Tesla, c’est de bénéficier de l’option Autopilot qui permet à la voiture de se conduire toute seule... ou presque. Si elle est effectivement bardée de capteurs et caméras pour pouvoir se diriger seule, l’Autopilot ne reste qu’un mode de conduite semi-autonome et n’est pas infaillible, comme l’atteste l’accident mortel survenu en 2016 d’un conducteur de Tesla S. Mais cela vaut pour tous les modèles de toutes les marques, la conduite « autonome » n’est qu’une aide supplémentaire et le conducteur doit savoir rester maitre de son véhicule.

 

Mais Elon Musk ce n’est pas que les véhicules électriques, c’est aussi le projet Hyperloop, mélange entre un métro miniaturisé et le train à sustentation magnétique. L’Hyperloop est en effet une étrange capsule permettant d’accueillir quelques dizaines de passagers et/ou marchandises, qui se déplace dans un tube à basse pression grâce à la force magnétique, et propulsé à quelques 1.100 km/h - à titre de comparaison l’Airbus A380 a une vitesse de croisière d’environs 900km/h. Pour rappel, il ne s’agit que d’un projet, qui n’est pas encore aboutit, mais dont on peut d’ores et déjà se faire une idée en observant certains trains à sustentation magnétique comme le Maglev au Japon, imaginé dès 1967 ! Tout comme Tesla Motors a ouvert ses brevets à la concurrence, Elon Musk n’a déposé aucun brevets sur l’Hyperloop, afin de favoriser un développement open source et collaboratif. De fait, plusieurs sociétés se sont emparées du projet, comme Hyperloop One, TransPod ou encore Hyperloop Transportation Technologies qui elle, a décidé d’établir un centre de recherche à Toulouse, sur l’ancienne base aérienne de Francazal.

 

Selon le PDG de la start-up Hyperloop Transportation Technologies, Dirk Ahlborn, « Toulouse est le centre névralgique de l'industrie aérospatiale européenne et il nous semble tout à fait naturel d'avoir une présence ici, aux côtés de nombreux de nos partenaires et confrères » En effet, on peut y retrouver entre autre Airbus et le centre technique et opérationnel du CNES, preuve que Toulouse se veut être la Silicon Valley à la française en matière de nouvelle technologie et de recherche en aéronautique. Et si l’Hyperloop semble marier transport terrestre et technologie spatiale, il est un autre domaine qu’Elon Musk affectionne tout particulièrement, et sur lequel il préfère centrer ses efforts, à savoir l’astronautique qu’il développe avec son entreprise - encore une ! - SpaceX.

 

SpaceX et la conquête de l’espace : en route vers la colonisation de mars


La conquête spatiale est surement l’un des plus grands rêves d’Elon Musk avec la robotique et le transhumanisme. Pour lui, il est impensable que l’humanité puisse rester ad vitam aeternam sur Terre, et il considère même que « Si nous restons toujours sur Terre, il y aura à
la fin un événement d'extinction massive. L'alternative est de devenir une civilisation voyageant dans l'espace, et une espèce multi-planètes. C'est ce que nous [SpaceX, ndlr] voulons » SpaceX est avant tout un des deux prestataires privés à travailler pour la NASA et construit principalement les lanceurs de fusées. Là où la société d’Elon Musk a pris une avance remarquable, c’est qu’elle a réussi le pari de pouvoir réutiliser ces lanceurs. En effet, en temps normal, une fois que la fusée a décollée et que le lanceur se détache, celui-ci retombe à la mer et n’est plus utilisable. SpaceX a donc conçu un lanceur capable d’atterrir à un endroit précis afin d’être réutilisé par la suite, et ce n’est aujourd’hui plus un concept mais bien une réalité, plusieurs de ces lanceurs ayant atterris avec succès aux endroits choisis.

 

L’intérêt d’une telle technologie est tant écologique - on peut réutiliser le matériel tel quel sans avoir à le reconstruire de zéro comme avant - qu’économique - un lanceur de fusée coute plusieurs dizaines de millions d’euros - et devrait permettre dans un futur plus ou moins proche de partir coloniser l’espace afin de s’établir ailleurs que sur notre planète Terre. En effet, la possibilité de réutiliser du matériel spatial devrait sur le long terme permettre de réduire drastiquement le prix moyen d’un voyage, et Elon Musk cherche à arriver à un coût de 200.000 dollars par voyageur d’ici 40 à 100 ans et rendre de la sorte la colonisation de Mars envisageable financièrement parlant.

 

Entre philanthropie, bizarreries et avancées majeures dans différents domaines technologiques, ce personnage qui lutte pour l’amélioration de la condition humaine tant sur le plan environnemental que sur le plan de ces petites améliorations qui nous facilitent le quotidien n’est-il qu’un savant fou qui a la tête dans les étoiles ou au contraire un futur grand nom du panthéon de l’humanité comme ont pu l’être Albert Einstein, Isaac Newton ou Léonard de Vinci ?

Jonathan Peccini

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