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Mario Draghi, l’éternel amoureux des taux bas

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Personnalité emblématique et incontournable de ces dernières années, Mario Draghi est un économiste renommé, ancien banquier d’affaire et haut fonctionnaire italien. Il est depuis 2011 à la tête de la Banque Centrale Européenne (BCE). Celui que l’on surnomme « Super Mario » et qui a succédé à Jean-Claude Trichet, a hérité de la lourde tâche de sortir la zone Euro de la crise qu’elle traverse.

Qui est super Mario ?


            Mario Draghi est né en 1947 à Rome d’un père banquier (Carlo Draghi) et d’une mère pharmacienne (Gilda Mancini). Il a étudié à l’Université La Sapienza où il obtiendra en 1970 une licence en économie et commerce. En 1976, il soutient sa thèse au Massachussets Institut of Technology (MIT) intitulée : « Essays on economic theory and applications » pour obtenir un doctorat en économie sous la direction de Robert Solow (Prix Nobel d’économie 1987) et Franco Modigliani (Prix Nobel d’économie 1985).

Il a été vice-président pour l’Europe de Goldman Sachs entre 2002 et 2005 avant de retourner en Italie où il sera gouverneur de la Banque d’Italie entre 2006 et 2011. Il est président de la Banque Centrale Européenne (BCE) jusqu’en octobre 2019.


Quels sont ses faits d’armes ?


Avec sa nomination, les gouvernements de la zone Euro marquent une rupture avec la politique monétaire très conservatrice mise en place jusqu’alors par Jean-Claude Trichet, son prédécesseur. Pour regagner la confiance des investisseurs, Draghi va se montrer plus flexible. Dès son arrivée en décembre 2011, il va annoncer un premier plan de refinancement appelé LTRO (Long Term Refinancing Operation) d’une durée de trois ans d’un montant de 489 milliards d’euros à destination des banques européennes. L’objectif principal est d’augmenter la liquidité du marché interbancaire afin d’inciter ces dernières à prêter davantage aux entreprises. À cette mesure vient s’ajouter une baisse des taux d’intérêts d’un quart de point afin de pallier l’augmentation des taux effectuée par son prédécesseur. Le but étant, en incitant les banques à prêter davantage, de favoriser l’activité de prêt aux entreprises et aux consommateurs dans la zone euro, ce qui va stimuler l’activité économique.

Au début de l’année 2012, une seconde vague LTRO est lancée pour atteindre un montant de 1000 milliards d’euros. Mario Draghi a le vent en poupe face aux investisseurs, il leur promet une véritable politique de relance.

Les résultats escomptés sont pourtant décevants. Alors, Mario Draghi entreprend plus tard, dès 2014, les TLTRO (Targeted Long Term Refinancing Operation, ayant une maturité de quatre ans) afin de s’attaquer aux problèmes de croissance et d’inflation dans la zone Euro. Les TLTRO mettent à disposition des banques européennes 400 milliards d’euros supplémentaires à des taux d’intérêts avantageux (0,15%) afin que celles-ci accordent davantage de crédit aux entreprises ainsi qu’aux ménages. Pour augmenter encore plus l’attractivité des TLTROs, la BCE a pris la décision d’abaisser les taux d’intérêts de 0,15 à 0,05% permettant aux banques européennes de s’endetter presque gratuitement. Pour aller plus loin, Draghi décide de renforcer de façon significative le caractère accommodant de sa politique monétaire, à travers le lancement d’une deuxième série d’opérations de long terme appelée TLRO II. L’originalité de celle-ci vient du fait que les montants que les banques peuvent emprunter dépendent désormais de leurs encours de crédits accordés aux entreprises non financières et aux ménages. En effet dans le cadre de ces nouvelles opérations, le taux d’intérêt appliqué dépend de la performance des établissements participants en matière d’octroi de crédit. Ainsi, les établissements ayant augmenté leur encours de prêts d’au moins 2,5 % sur une période de référence (Janvier 2016-Janvier 2018) bénéficieront d’un taux particulièrement avantageux, puisque ce taux correspond au taux de la facilité de dépôt de l’Eurosystème qui est négatif. On peut donc dire que si une banque améliore suffisamment son activité de prêt à l’économie (qui est déjà facilitée par les opérations de refinancement mises en place par la BCE), elle peut recevoir des intérêts, en « payant » un taux d’intérêts négatif, plutôt que de devoir en verser.


La fin du Quantitative Easing, le bazooka de la BCE


En 2015, la BCE décide de sortir l’arme anti-déflation : le Quantitative Easing (QE) ou programme d’assouplissement quantitatif en français. C’est la version moderne de « la planche à billets ». C’est un instrument de politique monétaire non-conventionnel. En effet, la BCE a pour habitude d’utiliser comme principal outil le taux d’intérêt auquel elle accorde des prêts aux banques. Taux qui déterminera celui des crédits auxquels souscrivent les ménages et les entreprises.

Le QE consiste à racheter massivement des titres de dettes aux institutions financières de la zone euro à hauteur de 60 milliards d’euros par mois. Dans ces titres, on va retrouver de la dette souveraine, des obligations d’États à long terme. En échange de ces achats, la BCE crée de la monnaie, plus spécifiquement des nouvelles liquidités qu’elle injecte dans les marchés. Puisque que les États sont très endettés (crise de 2008), les dettes d’États abondent. Ce programme va permettre à la BCE d’acheter pour plus de 1100 milliards d’euros de titres au total principalement auprès des banques. Pour s’attendre à des résultats plus que satisfaisants et sortir la zone Euro de la crise, celui que l’on appelle « Super Mario » annoncera une baisse du taux de facilité du dépôt pour accroître « la circulation des réserves des banques ». En outre, cette opération aura également comme avantage de rendre l’euro plus attractif car la quantité de monnaie échangée augmentera.

C’est le fameux « whatever it takes » de Mario Draghi, qui, lors d’une audience devant des parlementaires, fera asseoir sa ténacité quant à la sortie de crise de la zone euro. Il a toujours souhaité sauver l’euro et, « quoi qu’il en coûte », il est bien décidé à mener ses plans à bout. La zone Euro sera encore sous perfusion de liquidités pendant quelques mois en 2019, année qui se conclura par l’élection du nouveau directeur de la BCE. Mario Draghi pourrait alors rentrer dans l’histoire comme étant le seul président de la BCE à ne pas avoir relever les taux.

On peut légitimement se demander quelle sera la suite pour la zone Euro en prenant en considération les difficultés et les tensions qui pèsent sur l’UE à quelques mois des élections européennes. En effet, « le robinet à cash » – comme tant d’économistes aiment à le nommer – va bientôt arrêter de gonfler une économie qui se veut plus superficielle que réelle. Avec les différents plans de refinancement pour sortir la zone Euro de la crise, Mario Draghi a ouvert les vannes de son robinet à hauteur de 2600 milliards d’euros ; c’est l’équivalent du PIB français…


Pour comprendre et apprécier la valeur d’un outil comme le taux d’intérêt


Tout d’abord, livrons une définition du taux d’intérêt : c’est le rapport entre le revenu qu’un créancier reçoit d’un emprunteur (pour le prêt d’un capital, consenti à ce dernier pour une période donnée) et le montant de ce capital. Il mesure le prix du temps, le loyer d’un bien spécifique : la monnaie.

Dans une perspective néoclassique, le taux d’intérêt est le prix résultant de la rencontre entre l’offre et la demande de fonds prêtables. Ce prix permet l’ajustement de l’investissement et l’épargne. Celle-ci est d’autant plus élevée que le taux d’intérêt l’est aussi, car les agents économiques préfèrent consommer aujourd’hui plutôt que dans un avenir incertain.

Dans l’approche keynésienne, en revanche, le taux d’intérêt ne permet pas d’égaliser l’épargne et l’investissement, car l’épargne est la partie du revenu non consommé (c’est un résidu). Ainsi l’épargne sera d’autant plus élevée que le revenu le sera. Le taux d’intérêt, déterminé sur le marché de la monnaie, a alors pour fonction de rémunérer les agents économiques renonçant à la liquidité.

Conclusion : plus le coût des emprunts est faible et plus grand est le nombre des projets d’investissements rentables. Une baisse des taux d’intérêts a par conséquent tendance à stimuler l’investissement au détriment des placements financiers. Des taux d’intérêts faibles permettent aussi aux entreprises d’emprunter et de profiter de l’effet de levier, c’est-à-dire une amélioration de leur rentabilité économique par l’endettement. Cependant, la faiblesse des taux d’intérêts rend le crédit plus facile et alimente alors l’inflation.

L’encourt de crédit est le montant total des crédits émis par une ou des institutions financières à une date donnée et non remboursés. C’est un stock.

La dette de l’État est l’ensemble des emprunts que ce dernier a émis ou garanti et dont l’encours résulte de l’accumulation des déficits de l’Etat.

L’obligation d’État est définie comme un titre négociable émis par le Trésor (on parle donc d’obligations du Trésor Public).

La politique monétaire est l’ensemble des moyens mis en œuvre par un État ou une autorité monétaire pour agir sur l’activité économique par la régulation de sa monnaie. 

La liquidité des banques désigne les réserves dont disposent les banques leur permettant de faire face à une demande de remboursement en billets. Si la liquidité d’une banque diminue, celle-ci sera conduite à réduire sa création monétaire, c’est-à-dire accorder moins de crédits, ce qui handicape la croissance.

« La cause immédiate de l’inflation est toujours et partout la même : un accroissement anormalement rapide de la quantité de monnaie par rapport au volume de la production. » Milton Friedman.


Philippe HOARA


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