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Tinder : l'ubérisation du plan cul ?

Plus la peine de présenter cette application de rencontre. Dans le Game, Tinder s’est rapidement imposé comme un incontournable. Son plus grand avantage étant sa rapidité et sa facilité d’utilisation avec le fameux principe du swip droit, swip gauche à la chaîne, pour indiquer si oui ou non un profil nous plaît. Elle a su également pallier aux problèmes de distance pouvant apparaître sur les sites de rencontres plus classiques (les vrais savent) grâce à l’utilisation de la géolocalisation qui permet de voir des profils dans un périmètre de quelques kilomètres autour de soi seulement. Tinder a su s’adapter à l’accélération des modes de vie et au besoin d’instantanéité  grandissant dans nos sociétés. Tout et tout de suite, serait alors la promesse de cette application de rencontre. Sans prétention l’application aux 2 millions de matchs nous promet de faire des rencontres, allant de l’amitié au coup d’un soir, jusqu’à l’Amour pour les plus chanceux.  Cette demande d’immédiateté, depuis longtemps captée par les entreprise (l’exemple typique étant les chaînes de fast-food), se serait t-elle généralisée à la rencontre amoureuse avec Tinder ? Assistons-nous seulement à l’ubérisation du plan cul ? Tout romantisme est-il mort en 2017 ? Pour vous lecteurs, j’ai mené l’enquête. Voici une étude complètement subjective  sur Tinder, son fonctionnement, ce qu’on vient y chercher et ce qu’on y trouve.

 

PART 1 : La sélection

 

 Pour ma première inscription sur l’appli, beaucoup de questions m’ont traversée l’esprit. «  Vais-je trouver l’homme de ma vie ?» n’en faisait clairement pas partie. En revanche, je me suis surprise à réfléchir de manière objective à mon potentiel séduction. Autrement dit, à vouloir calculer mon attractivité en fonction du nombre de matchs que j’obtiendrai. Pour ceux qui ont la chance de ne pas connaître l’application, il y a Match (traduisible par « correspondance » ou « affinité ») lorsque deux profils se sont validés mutuellement. Ainsi, je m’interroge sur le potentiel de ma photo de profil à accrocher l’œil du plus grand nombre. De même, je m’interroge sur mes critères de sélection de manière très rationnel. Brun ? Blond ? Barbu ou pas, jusqu’à même la profession, j’affine mes critères à mesure que les portraits défilent.  De mon côté, je me demande si mon profil est assez convaincant, en d’autres termes si mon CV est à la hauteur de mes espérances. Recruteur et à la fois recrutée, Tinder offre la possibilité de rationaliser  les rencontres à l’extrême. Swip gauche, swip droit,  tu passes ou pas. Une forme d’addiction se met en place au travers de ce geste matérialisant notre validation ou notre désintérêt.  Si au début, mes critères de sélection étaient assez faciles à remplir, je suis vite devenue exigeante en cherchant toujours à avoir mieux. « Le mieux » étant bien évidement basé sur le physique, quasi-seule information que l’on est à disposition mise à part l’âge le prénom et parfois une petite description sommaire de la personne.

 

PARTIE 2 : Le match

 

Les matchs, à ma grande surprise, ne se sont pas fait attendre (environs 10 minutes après mon inscription). Puis j’ai compris. Nous les filles, on se fait très souvent valider, les garçon préférant opter pour la technique (efficace) du « filet de pêche ». La stratégie consiste à être assez (voire très) indulgent afin de valider un maximum de filles et d’obtenir le plus grand nombre de matchs possibles et de faire ensuite le tri parmi les affinités (Match) obtenues.  Si au début on se sent comme une princesse devant une foule de prétendants, l’application vient vite te rappeler qu’au même titre que les mecs, tu n’es qu’une parmi tant d’autres.  Parmi mes matchs, un s’est particulièrement bien passé. Bien sûre on n’évite pas les sempiternels « Salut ça va ? »  (éliminatoire en ce qui me concerne) chez la majeure partie des candidats, mais j’ai eu la chance de trouver rapidement un match avec qui le contact fut facile et avec qui je partageais à première vue beaucoup de points communs. Ce match s’est donc rapidement suivi d’un rendez vous IRL (In Real Life). L’appli semble donc, à première vue tenir toutes ses promesses.

 

PARTIE 3 : La rencontre IRL (in real life)

 

Sur le trajet, je réalise soudain. Je suis un énorme mensonge, une vraie intox. La vison que ce garçon a de moi en est une version parfaitement lissée et enjolivée. Comme quand mon week-end à Londres à faire la tournée des bars vient se transformer en 3 mois de séjour linguistique dans mes lettres de motivation. Certains diront les joies d’internet et des réseaux sociaux. Mais en abusant de filtres Snapchat et de quelques clichés pris sous le bon angle, j’ai réussi à reconstruire une image de moi qui me convenait mieux, et à  passer sous silence tout ce qui aurait pu me gêner lors d’une vraie rencontre. C’est sûr qu’en vrai, les bourrelets disgracieux ou une acné un peu envahissante sont beaucoup plus difficiles à cacher. Lorsque j’aborde le sujet,  il tente de me rassurer. « Il n’y a pas que le physique tu sais ! ». Si tu le dis…

Le rendez vous se passe extrêmement bien. A ma grande surprise tout est cool, et on passe un moment super sympa en étant des quasi-inconnus quelques heures plus tôt.  On s’amuse beaucoup et on décide même de se revoir à plusieurs reprises. Mais il subsiste une gêne, un petit je ne sais quoi sûrement responsable  du fait qu’on se soit très rapidement perdus de vue. Avec du recul, le cadre de l’application qui a pourtant permis notre rencontre, s’est vite transformé en une limite pesante nous empêchant de  construire ne serait-ce qu’une amitié plus solide.

 

 

J’ignore ce qui a foiré. Après tout les récits de rendez-vous ayant eu une fin catastrophique que j’ai lu et entendu, j’avais pourtant eu l’impression d’avoir décroché le rendez-vous parfait, d’avoir obtenu le high score du  rendez-vous Tinder ! Sans pouvoir apporter un élément tangible sur les raisons précises de cette  fin brutale, voici mon hypothèse tenant directement aux applications de rencontre.

Avec sa popularité, Tinder a réussi à créer un nouveau type de relation, « le rendez-vous Tinder ». Le rendez-vous Tinder, par essence superficiel, nous fait miroiter  ce que l’on recherche réellement, au travers d’une logique d’offre et de demande. Son côté jetable en fait un produit de consommation rapide. L’individu disparaît alors derrière cette logique d’entreprise omniprésente qui se fait ressentir au travers du catalogue des portraits que l’on balaye d’un coté ou de l’autre de l’écran. L’abondance du choix et sa facilité d’accès, nous rapproche en effet plus d’un supermarché de la drague que d’un réel outil de rencontre. Peut-on pour autant le reprocher à Tinder ? Rappelons que le logo du célèbre site de rencontre « Adopte un mec » est celui d’une femme mettant un homme dans son caddie. En réalité, les sites de rencontres ont seulement rationalisé et utilisé à des fins de profits ce que l’on fait tous déjà plus ou moins. La sociologie nous montre très bien que nos amis, nos amours et nos rencontres dépendent de variables telles que notre catégorie socio-professionnelle, notre éducation, et par extension nos opinions politiques jusqu’à notre groupe ethnique. Rares sont aujourd’hui les couples pouvant se targuer d’avoir outrepassé des différences fondamentales issues de l’environnement même où chacun à grandi. Ainsi, il est normal que nos critères de beauté soient affectés par une certaine détermination sociale qui se révèle alors flagrante sur Tinder.

Mekhtoub, Adopte-un mec, Elite rencontre et j’en passe fonctionne sur cette logique. De même que Tinder qui n’est finalement qu’une actualisation 3.0  de ses sites se différenciant essentiellement par  son support et son côté rapide, d’où son relent d’avènement du marché des start-up.

Alors pourquoi ça ne marche pas pour tout le monde ? (pas pour moi ?) La réponse romantique voudrait qu’un rendez-vous immatriculé Tinder ait toujours moins de saveur que le hasard d’une rencontre, même si celle-ci s’effectue lors d’une soirée pourrie – donc – à 3 grammes, ou au Burger King du coin. En somme la vraie vie quoi.  Si j’adhère en partie à cette vision, je retiens de mon expérience Tinder qu’à défaut d’avoir su dépasser le cadre qu’elle m’imposait, elle m’a permis de me questionner quant à l’utilité et l’usage fait de ses applications et à la réelle difficulté de se rencontrer de nos jours.

 

NB : Après 2 semaines passée sur Tinder, l’auteur se désinscrit à tout jamais laissant une foule de prétendants déçus.


Pauline DUBLANCHET 


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