PMA : une disparité de législation en Europe
La loi du 6 août 2015 relative à la bioéthique, dont les dispositions sont incluses dans le Code de la Santé Publique, encadre l’ensemble des techniques médicales utilisées pour recourir à la PMA, dite « Procréation Médicalement Assistée ». Selon des professionnels du droit, elle « désigne l’ensemble des méthodes chimiques et biologiques permettant la conception in vitro, le transfert d’embryons et l’insémination artificielle ainsi que toutes les techniques ayant pour objectif la procréation en dehors du processus naturel ». En se tenant aux mots de l’Institut National de la santé et de la recherche médicale, cette méthode « consiste à manipuler un ovule et/ou spermatozoïde pour procéder à une fécondation ».
Qu’en est-il en France ?
Afin de bénéficier de cette assistance, les couples doivent remplir différentes conditions posées par la loi.
En France, actuellement, la Procréation Médicalement Assistée est autorisée pour les couples de sexe différent, étant mariés, en concubinage ou pacsés. Cette situation est envisageable lorsque l’un des membres du couple est atteint d’une maladie grave susceptible d’être transmise à l’enfant ou au conjoint mais également lorsque l’un des deux conjoints présente une stérilité ou une infertilité pathologique, aux termes de l’article L2141-2 du Code de santé Publique. Ainsi, les femmes célibataires et les couples de femmes n’ont pas accès à cette approche.
Questions que cela pose :
Aujourd’hui, les questionnements concernant le droit à la PMA, sont au cœur du débat. L’élargissement de la PMA aux femmes seules et aux couples de femmes reviendrait à affirmer l’existence d’enfants sans père, d’autant plus que le Convention Internationale des droits de l’enfant, signée et ratifiée par la France établit le droit pour chaque enfant, dans la mesure du possible, « de connaître ses parents et d’être élevé par eux » (Article 7). Néanmoins, le Comité consultatif national d’éthique s’est affirmé plusieurs fois favorable à cette extension.
Caroline Mecary, avocate et spécialiste du droit des homosexuels se confie au média « Brut » : « ce n’est pas parce qu’une femme est célibataire aujourd’hui, qu’elle le restera toute sa vie. Et n’est pas parce qu’une femme est en couple avec un homme, qu’elle va rester toute sa vie avec cet homme ». Elle convient que chacun a le droit de faire ses choix comme il le souhaite. Quant à Aude Mirkovic, qui s’oppose au discours de l’avocate, l’ouverture de la PMA à toutes les femmes est « la mesure la plus lunaire du projet de loi ». D’après elle, cet acte susciterait de la précarité et des difficultés au sein des familles monoparentales.
De plus, en élargissant les conditions de la PMA, Les Républicains craignent de faire un pas vers la GPA (Gestation Pour Autrui), interdite par la loi française actuellement et cela dans de nombreux autres pays européens.
Le 27 septembre 2019 l’article 1 du texte bioéthique, favorable à la Procréation Médicalement Assistée, a été adopté en première lecture à l’Assemblée Nationale. C’est à la suite de cela, que des manifestants anti-PMA, défilant sous l’étiquette « Marchons enfants ! », arpentent les rues de Paris, le 6 octobre 2019. Le 15 octobre 2019, le texte de la PMA pour toutes, promesse de campagne d’Emmanuel Macron, est adopté par l’Assemblée Nationale, après environ quatre-vingts heures de débat. Voté par 359 voix contre 114, avec 112 abstentions, le projet de loi doit être soumis au Sénat en janvier 2020 et le gouvernement français espère ainsi parvenir à l’adoption de cette loi.
Une Europe désunie ?
Le débat, loin de se cantonner aux frontières de la France, concerne l’ensemble des pays européens.
Aussi bien en France, comme en Italie, Lituanie, Allemagne, Slovénie, Slovaquie, Roumanie et République tchèque, la PMA est autorisée pour les couples hétérosexuels. Ainsi, les femmes seules et les couples homosexuels en sont toujours exclus.
Il existe cependant des législations plus souples et progressistes en Europe, autorisant l’accès de la PMA aux femmes seules et/ou aux couples de femmes. En Espagne, en Suède ou encore au Portugal, cela est possible si la femme est considérée en « âge naturel de procréation ». Cette limite d’âge est aussi présente en Grèce, en Belgique, en Bulgarie, en Estonie, en Irlande, au Luxembourg où ici, un âge maximum est fixé par la loi, allant de 40 à 50 ans, en fonction des différentes législations. A contrario, en Autriche, à Chypre, en Hongrie, à Malte ou en Lettonie, la PMA est autorisée pour les couples de femmes, sans aucune limite d’âge, mais pas pour les femmes seules.
Ces différences poussent les citoyens vivants dans des Nations plus restrictives à se retrancher vers une PMA possible à l’étranger. En effet, le Comité consultatif d’éthique estimait en 2017 que « deux milles à trois milles femmes » françaises s’étaient rendues à l’étranger pour avoir recours à cette pratique. Les femmes peuvent choisir leur destination par rapport à la législation concernant l’anonymat du donneur.
Au total, onze membres de l’Union Européenne autorisent la PMA à toutes les femmes. Le Danemark est reconnu comme étant le pays ayant le plus recours à la PMA et c’est d’ailleurs le premier pays qui a légalisé les unions homosexuelles en 1989.
Enfin, d’après la « Société européenne de reproduction humaine et d’embryologie », le développement de la PMA dans les différents pays européens, ne cesse d’accroître depuis quelques décennies et de même, pour la décennie à venir.
Dossier réalisé par Juliette Camier, Alexandre Salavert, Alfreda Edorh