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Brésil : Joga Bonito, vraiment ?

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Rio ne répond plus. Le 28 octobre 2018, 55,1% des brésiliens ont voté pour le candidat du parti social-libéral (PSL), à savoir Jair Bolsonaro, contre 44,9% pour le candidat du parti des travailleurs (PT), Fernando Haddad. Si d’aucuns s’inquiètent profondément pour leurs droits, d’autres se réjouissent de ce résultat. Et espèrent un nouvel horizon qui mettra fin à la corruption enracinée dans le pa

Une situation délétère

 

Sept. C’est le nombre d’homicides, en moyenne par heure, au Brésil en 2016 d’après l’ONG Forum brésilien de sécurité publique. 76,2% des victimes sont noires et 81,8% sont âgées de 12 à 19 ans d’après l’ONG. D’après l’édition 2016, une hausse de 26,8% de personnes tuées par des policiers a eu lieu.

 

Cette situation de violence est pointée du doigt par Bolsonaro, qui en fait l’arme principale (outre la lutte anti-corruption) de son programme électoral. Nombreux sont les brésiliens convaincus par ses propositions tant ils sont inquiets pour leur sécurité dans leur pays.

 

 C’est ce qui ressort clairement de nombreux témoignages.

 

 Parmi les pro-Bolsonaro beaucoup estiment que son élection va stabiliser la situation de violence qui abat le pays un peu plus chaque jour, quand d’autres promeuvent l’idée que le Parti des travailleurs est incompétent pour améliorer la situation, car au pouvoir depuis 2003, la violence règne toujours. Tout comme la corruption.

 

 Le témoignage le plus frappant est sans aucun doute celui-ci : « J’ai plus peur de mon quotidien que des discours de Bolsonaro », affirmait un partisan du nouveau président questionné à propos de la torture défendue par ce dernier. Alors qu’un autre, au sein d’une favela et interrompu par des détonations (témoignant le climat d’insécurité), dénonçait les luttes entre gangs pour prendre le contrôle des favelas. À cet égard, le représentant du parti social-libéral veut mener une guerre totale contre ceux-ci en octroyant, notamment, un véritable permis de tuer à la police : « Je veux une police civile et militaire qui défend le peuple et qui tire pour tuer » martelait-il le 28 mars 2018. Propos qui conforte l’atmosphère de violence propagée dans le pays.

 

 Quant à ses autres partisans, certains votent pour lui afin de rejeter l’autre candidat, Fernando Haddad, qui fait partie de la même formation politique que Lula, mis en cause dans une affaire de corruption. Et à ce prix ils sont prêts à nier ses propos les plus extrêmes. Alors que d’autres, victimes de l’insécurité sont davantage réceptifs aux discours a priori sécuritaires de Bolsonaro qui prévoient, notamment, l’autorisation pour chacun de porter une arme.

 

Des propos menaçants

 

 Concernant les partisans de Fernando Haddad, la déception est grande. La peur l’est toute autant, si ce n’est davantage. Face à un président ouvertement misogyne, homophobe, sexiste, raciste, anti-écologiste, de nombreuses communautés se sentent en insécurité.

 

 Voici un florilège de propos proférés par lui-même : il a notamment déclaré, à l’égard d’une députée de gauche en 2014, qu’elle ne « méritait pas d’être violée par lui ». Favorable à la torture, il déclare en 1999 : « Je fermerai le congrès et ferai un coup d’État ».  À propos d’opposants politiques, il affirme le 21 octobre 2018 : « Ces marginaux rouges seront bannis de notre patrie ». La communauté homosexuelle peut-elle aussi se sentir menacée, tant ses paroles sont violentes : « Si ton fils commence à devenir gay, il faut le frapper, il changera de comportement », martelait-il en novembre 2010. Ou encore, à propos des indigènes : « Pas un centimètre de plus pour leurs terres ».

 

 De fait, des hommes et des femmes témoignent de leur peur de sortir dans la rue au motif qu’ils sont ce qu’ils sont. Peur également du rétablissement d’une dictature militaire, comme celle mise en place entre 1964 et 1985. Peur, encore, d’une violence qui ne peut-être qu’aggravée.

 

Un programme fondé sur trois axes

 

 Tout d’abord, la sécurité et la lutte anti-corruption sont visées. Ainsi, il souhaite investir massivement dans les forces de police et conférer aux forces de l’ordre la protection juridique de l’État pour éviter leur condamnation à la suite de bavures. Ce qui montre sa volonté de créer un régime autoritaire, empiétant largement sur les droits des citoyens.

 

 Aussi, il souhaite réformer l’Estatuto do desarmamento (« statut de désarmement ») afin d’octroyer le droit pour chacun de porter une arme. Ce qui permet, selon lui, de garantir au citoyen « son droit à sa légitime défense, à celle de sa famille, à sa propriété et celle d’un tiers ». Et met en lumière, par la même occasion, un paradoxe avec sa volonté de lutter contre la criminalité.

 

   Profitant de l’incarcération de Lula pour corruption et ainsi décrédibiliser son adversaire du parti des travailleurs, il propose davantage de transparence dans les dépenses publiques, ainsi que la privatisation de certaines entreprises publiques pour réduire les risques de corruption et les dépenses inutiles.

 

 Ensuite sont concernées la santé et l’éducation. Au sein du pays existe une véritable fracture scolaire entre établissements privés et publics. Ces derniers, par manque de moyens, favorisent les décrochages scolaires et l’arrêt des études pour les jeunes des milieux populaires. Les inégalités ne sont alors que creusées.

 

 Enfin, il prône une économie ultralibérale. Son programme économique émane en partie de l’économiste libéral Paulo Guedes. Bolsanero veut réduire le déficit public dont il rejette la faute sur le parti de son adversaire principal. Selon lui, le déficit serait à l’origine « des crises, du chômage, de l’inflation et de la misère ». Il propose alors une baisse de 20% du volume de la dette en privatisant ou capitalisant une grande partie des entreprises publiques brésiliennes.

 

 Par ailleurs, surnommé « Trump tropical » en raison de ses propos extrêmes, il se distingue toutefois de lui concernant le commerce international. Ouvert à ce domaine, il promeut la baisse de nombreux taux d’importation et de barrières non tarifaires, parallèlement à l’établissement de nouveaux accords bilatéraux.

 

La protection environnementale mise en danger

 

 Souhaitant intégrer les questions environnementales au ministère de l’agriculture, il propose une refonte des ministères car, selon lui, « un grand nombre est inefficace ».

 

 Nonobstant tout enjeu environnemental, il souhaite la sortie du Brésil de l’accord de Paris sur le climat, alors que son pays a une place très importante en matière environnementale tant l’Amazonie est considérée comme le poumon de la Terre. Sa volonté de créer une autoroute au sein de cette forêt ne fait que démontrer son hostilité face à cet enjeu. Tout comme celle d’ouvrir la forêt à l’exploitation minière, répondant ainsi favorablement aux lobbyistes de l’agrobusiness.

 

 Il n’est pas sans rappeler qu’en 2017, la forêt amazonienne a diminué de 7000 km². Le Brésil est le sixième pollueur mondial.

 

 En définitive, les élections présidentielles du Brésil sont une véritable tempête qui s’abat sur la scène mondiale et environnementale. Dans un climat de violence, nombreux sont ceux qui ont été réceptifs aux idées radicales proférées par Bolsonaro. Le recul des libertés n’en est que considérable.

 

 Le Brésil n’est pour autant pas le seul pays affecté par la montée des mouvements de haine et de l’extrême droite. L’Europe est également touchée. Les États-Unis aussi, abritant pourtant la statue de la liberté, aussi appelée « La Liberté éclairant le monde ». Jusqu’à quand ?

 

                                                                                                                                                                    

Fabien PERONNET

 

 


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